top of page
330px-Perugino,_fortezza_e_temperanza.pn
I-Grande-5880-image-de-saint-thomas-d-aq

Supporter et attaquer


Saint Thomas affirme que « la force de Dieu, c’est son immutabilité. » Puissions-nous tous participer de cette force divine ! Immuables et stables dans le bien par conséquent. Telle est la sainteté, perfection des vertus.


Les vertus cardinales sont au nombre de quatre : prudence, justice, force et tempérance.

« La force est une fermeté d’âme qui est nécessaire et pour faire le bien et pour supporter le mal, surtout si l’un et l’autre présentent des difficultés. » (II II q. 139 a.1)


C’est bien la vertu qui manque tellement de nos jours ! La fermeté d’âme se conjugue avec l’amour de la vérité, qui fait des cœurs virils.


« La force est non seulement une vertu requise pour que l’homme soit selon la raison, mais qu’elle occupe le troisième rang dans la hiérarchie des vertus, immédiatement après la prudence, perfection de la raison, et de la justice générale (et spéciale) qui la réalise en société selon l’ordre dicté par ladite raison. Conserver la bonne disposition des parties dans un tout, lesquelles sont toujours tentées de s’en séparer à cause des passions qui assaillent l’humaine faiblesse, appartient par excel¬lence à la force. Pour accomplir ce qui doit être et être fait, il faut toujours en premier lieu du courage. » (Marcel De Corte, La Force, vertu bafouée)


Le courage est double en cette vertu car elle a deux directions qui se complètent : « Dès lors, si l’ordre de préséance des vertus cardinales est bien : prudence, justice, force, tempérance, et le cortège des autres vertus (II II, q.123 a.12), dans la pratique, sans laquelle il n’est ni vertu, ni bien commun ou particulier, la force est la condition de toute vertu et de tout bien, puisqu’il est essentiel à la vertu d’agir de façon ferme et victorieuse, particulièrement lorsqu’il s’agit de supporter et de repousser les assauts et les périls extrêmes dans lesquels il est le plus difficile de rester ferme. (…) Toute vertu fait appel à la force, et la force est proprement elle-même en présence du danger et des maux temporels qui détournent l’homme de l’exercice des vertus cardinales dont la prudence et la justice sont les foyers. » (Marcel De Corte, La Force, vertu bafouée)

En face de la peur qui hébète ou fait perdre la raison, il faut résister par des actes courageux. C’est Garcia Moreno qui, étudiant, avait peur de tout ! Pour vaincre cette couardise dont il avait honte, il révise ses examens sous un rocher en équilibre. C’est par cet acte - acte capital pour lui - humble et persévérant (il aurait pu être écrasé par le rocher imposant…) qu’il va devenir le chef catholique de l’Équateur que l’on connaît. Rien ni personne ne lui fera plus peur désormais. Il mourra le 6 août 1875 sous les balles des francs-maçons en prononçant ces mots « Dios ne muere – Dieu ne meurt pas ! »

En face du mal (tentation, péché, démon) il faut résistersustinere - afin de demeurer debout dans la tempête faisant rage. C’est la force des martyrs devant les bourreaux qui leur arrachent la vie par les sévices dont ils les accablent. C’est sainte Jeanne d’Arc résistant à Cauchon et ses juges et aussi à ses geôliers qui veulent lui faire perdre sa virginité.

En face du mal il faut aussi aller à l’assaut, attaquer - aggredi. C’est saint François d’Assise qui, lors d’une tentation contre la pureté, ôte son froc et se jette dans un roncier. Cet acte de courage contre le démon lui vaudra une immunité totale, pour le reste de ses jours.


Ces quelques exemples pris parmi tant d'autres nous montrent la beauté de cette vertu rehaussée mille fois par le don du Saint-Esprit, que nous verrons bientôt.


Je me plais en terminant à citer encore Marcel De Corte, tant sa brève étude sur la force est lumineuse et roborative, et à lire absolument en nos temps où les caractères sont si flasques.


« L’histoire simple et bouleversante contée par Ramuz dans Derborence illustre le réalisme de la vertu de force chez les plus obscurs des hommes, mais les plus proches aussi de la terre et du ciel à la fois. (Nous avons déjà cité cette parabole en conclusion de notre Essai sur la fin d’une civilisation, mais sans la placer sous l’éclairage de la force naturelle et surnaturelle.) Quelques pâtres sont montés dans leurs chalets au-dessus des nuages pour garder leurs troupeaux en transhumance. Une nuit, la montagne contre laquelle s’adossent leurs bergeries s’écroule. Un seul échappe à l’avalanche. Il se trouve enseveli sous un amas gigantesque de roches. Pendant deux mois, il se nourrit de pain sec et d’eau suintante. Il tâtonne sous la pierre. Il se creuse une issue, se déchirant les mains, tantôt vaincu et toujours victorieux de sa défaite. Il arrive enfin au jour, muet, bégayant, spectral. Car il veut vivre. Son foyer a besoin de lui. Son foyer l’attend. Il redescend au village qui s’émeut devant son fantôme. Le curé s’avance à sa rencontre armé de la croix. Sa femme s’approche, s’arrête. « Et elle, l’ayant encore regardé attentivement, bien qu’à distance, comme si elle n’osait pas s’approcher : – Oh ! Antoine, est-ce toi ? – Touche seulement, c’est de la peau, c’est de la viande et puis à présent que j’ai passé sous la croix… Touche seulement, disait-il, tu verras, ce n’est pas de l’idée, c’est solide, ça dure, c’est moi… – Oh ! disait-elle, est-ce possible ? » 


L’avenir est à la magnanimité des humbles, à leur force inépuisable. » (Marcel De Corte, La Force, vertu bafouée)

Cet homme, ne sachant peut-être ni A ni B, était un homme. Un VIR, plein de FORCE. Il avait résisté contre la mort, il avait attaqué pour vivre !

Abbé Dominique Rousseau
2 juin 2020

unnamed (1).jpg
bottom of page